Une enquête réalisée par le Consortium National pour la Participation Citoyenne du 15 mars au 5 avril 2013 sur les perceptions des jeunes malgaches de 15 à 24 ans à propos de la vie nationale, de la conduite des affaires publiques, ainsi que de leurs centres d’intérêts concernant l’éducation, l’emploi, la santé et l’environnement a permis de cerner les principaux problèmes de ces jeunes (alcoolisme, drogue, avortement, cas de grossesses précoces, phénomène de mères célibataires) et de corroborer l’avis de la Direction Régionale de l’Éducation Nationale DIANA et de ses services rattachés au sujet des difficultés que connaît l’enseignement moral et civique au sein des écoles.
Certains des établissements primaires et secondaires de Diego Suarez feraient la part congrue à cette matière. Serait-ce là une part d’explication au manque d’intérêt de la population vis-à-vis de la malpropreté et de la pollution des lieux publics ? Devrait-on y attribuer une des causes de la montée de la délinquance et du décrochage scolaire, du non-respect des valeurs familiales et culturelles, de la difficulté de s’occuper d’autrui et de se préoccuper du bien commun, de la sexualité précoce?
La Grande Ile compte actuellement plus de 22 millions d’habitants dont la moyenne d’âge est de 18 ans. Plus de 13 millions de jeunes du pays sont âgés de 10 à 24 ans. Selon l’Observatoire des Droits de l’Enfant de la région Océan Indien, ce nombre sera multiplié par deux en 2025. La situation de l’éducation à la citoyenneté et au civisme, est préoccupante quand on connaît le poids de la jeunesse dans le développement à Madagascar. D’après le Directeur de l’Institut National de la Jeunesse, il faut que des mesures soient prises pour répondre au mieux aux besoins des jeunes. Les lacunes en information, mais aussi la culture, la tradition, la timidité ainsi que le manque de volonté constitueraient les principaux freins à la participation des jeunes à la vie sociale.
Une réaction à cet état de fait est amorcée. Les programmes d’éducation civique dans les collèges d’enseignement général et dans les lycées sont fixés et appliqués à partir de l’année scolaire 2015-2016, par le Ministère de l’Éducation Nationale. Madame le Délégué Régional de l’Éducation de Masse et du Civisme (DREMC) effectue des démarches de sensibilisation depuis octobre 2014, d’une part, auprès de la population par le biais des médias et, d’autre part, par l’éducation des parents. La Déléguée est d’avis que la promotion du civisme passe aussi par les parents et par les autorités scolaires. Il s’agit d’élaborer un programme favorisant l’apprentissage de notions de civisme autant chez les adultes que chez la jeunesse. Ce programme et les activités qui ont déjà été entreprises entrent dans le cadre de la nouvelle Politique Municipale de Développement Social (PMDS) de la CUDS.
Conscients de l’importance de renforcer le civisme et le sens moral chez les jeunes, Azimut et la DREN-DIANA ont conjugué leurs forces afin de dresser un premier portrait de l’éducation à la citoyenneté et au civisme au sein des établissements scolaires de la CUDS. Les deux parties ont mené conjointement une enquête le 13 mars dernier à l’EPP La Vigerie auprès de 77 enseignants provenant des 21 écoles publiques de la CUDS. Ils ont cherché réponse à de nombreuses questions lors de leur enquête : Enseigne-t-on l’éducation civique dans l’ensemble des écoles publiques de la CUDS ? Comment est dispensé cet enseignement ? Quels sont les supports et les documents utilisés ? La notion d’éducation civique est-elle comprise de la même façon par tous les enseignants ? Que pensent les enseignants du programme d’éducation civique et de l’impact sur le comportement de leurs élèves?
D’après le résultat de cette enquête, 56 % des enseignants n’ont reçu qu’une formation partielle d’éducation civique. En effet, retirée du programme d’enseignement national en 1975, l’éducation civique n’a été réintégrée qu’en 1991 au sein des écoles publiques de la Grande Île. Ces enseignants se disent, en majorité, insatisfaits du programme d’éducation civique et de l’impact de l’enseignement de l’éducation civique sur le comportement de leurs élèves. Ils citent le manque de documentation et d’outils pour assurer l’enseignement des leçons, les lacunes pédagogiques (méthodes d’enseignement et thématiques non adaptées ou désuètes, trop courte durée et faible fréquence des leçons), la faible implication des parents dans l’éducation civique de leurs enfants et le besoin de formation à l’enseignement de cette matière. Les élèves ne verraient pas l’intérêt à appliquer les notions enseignées en classe dans leur vie quotidienne.
Appuyée par la DREN-DIANA, Azimut et de nombreux organismes expérimentés dans le domaine souhaitent dynamiser et harmoniser l’enseignement du programme d’éducation civique national dans les écoles publiques de la CUDS afin de lutter contre les problèmes de comportement civique chez la jeunesse. Dans le but de renforcer l’esprit de solidarité et les échanges d’expériences entre les différents acteurs-clés impliqués dans l’éducation civique des jeunes et ainsi assurer une synergie d’action entre ces différents acteurs, une réunion a été organisée le 29 avril 2015 au bureau Chef de la Région DIANA.
Les manquements aux règles du civisme s’observent à tous les échelons de la société diégolaise. La jeunesse n’est pas épargnée. Comment remédier à cet état de fait ? Quelles actions prioriser pour redresser la situation ?
Un compte-rendu de cette première rencontre se veut un début de réflexion de proposition concrète de coordination des activités d’éducation civique à proposer aux jeunes de la communauté urbaine de Diego Suarez. Puisse-t-il servir à faire vivre le Conseil Régional de l’Éducation mis en place en 2014.
Toutefois, à l’issue de ce travail, une question subsiste : comment passerons-nous à l’action une fois les problèmes identifiés, les données analysées et les axes d’intervention fixés? « Appuyons nous sur ce qui existe localement » et « Soyons pratiques ! » sont les mots d’ordre de l’ensemble des acteurs à l’issue de cette rencontre.